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Kurt Tucholsky
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«Les Pyrénées c'était quelque chose comme une bande rousse sur la carte, verte et noire par ailleurs, sur laquelle apparaissaient quelques taches: les montagnes. A droite et à gauche la carte virait au bleu, c'était la mer. Oui, les Pyrénées séparaient l'Espagne de la France. Avec ça, il fallait chaque fois réfléchir un brin avant d'écrire leur nom.»
Publié en 1930, ce récit, traversée géographique, sociale et humaine de la région des Pyrénées, s'organise moins comme un journal classique que comme une série de tableaux ou de portraits, dans lesquels sont décrits les événements auxquels assiste ou participe Tucholsky. Accueilli par des habitants dépassant l'hostilité nationaliste franco-germanique, il y découvre ses traditions et ses voix multiples, mais aussi son histoire: du Cirque de Gavarnie, aujourd'hui encore un haut-lieu du tourisme pyrénéen, à la ville de Lourdes, en passant par les villes de Cauterets, la station thermale d'Eaux-bonnes, la Corrida à Bayonne, les Basques de Saint-Jean-Pied-de-Port... Tout est observé et décrit par l'auteur avec une minutie et une justesse rares, qui se ponctuent par ce ce que Jean Bréjoux nomme une «déclaration d'amour à la France». Un accueil et un abri essentiels alors que son pays natal, l'Allemagne, devenait, pour lui et sa pensée, invivable. -
Moment d'angoisse chez les riches ; chroniques allemandes
Kurt Tucholsky
- Heros Limite
- Feuilles D'herbe
- 19 Septembre 2012
- 9782940358878
«Ce que c'est, je n'en sais rien... mais je sens confusément que quelque chose approche à pas feutrés, qui menace de tous nous anéantir. Nous, c'est notre vie ancienne, ce sont les îles verdoyantes que, malgré tout, nous avions réussi à édifier au milieu du courant de ce ridicule tapage - nous, c'est notre vieux monde auquel, malgré tout, nous tenions tant. Où allons-nous ? [...] Que savons-nous du temps ? Nous sommes à ses pieds comme le voyageur au pied de la falaise rouge, beaucoup trop près pour en voir la structure, et encore moins la beauté. Que savons-nous de notre temps ? Nous sommes ses instruments, et je crois que le meilleur d'entre eux est encore celui qui ne cherche pas à lui faire obstacle.»
Ces Chroniques allemandes sont le regard d'un Allemand, qui a choisi l'exil en France avant même l'arrivée des nazis au pouvoir, sur tout ce qui fait la vie de l'Europe de 1914 à 1935 : la guerre, l'armée, la justice, l'art, le théâtre, la littérature, les gens et les paysages. Regard d'un Allemand sur la France, d'un Français d'adoption sur l'Allemagne, d'un Juif sur l'Europe en folie. Regard féroce, plein d'humour, de colère, de tendresse, de raison et de prophétie. Trait vif, langue mordante, tableaux et poèmes, petit théâtre de personnages familiers et grotesques, bataille courageuse au jour le jour... Le combat et les déchirements d'un intellectuel tenté par le communisme, déçu par la social-démocratie, qui voit venir l'apocalypse, et se sent de plus en plus seul loin d'une Allemagne qui se perd - jusqu'au jour de décembre 1935, où, en Suède, il se donne la mort. -
L'histoire s'alanguit sous le doux soleil de Suède, lors des vacances estivales de Peter, avec sa fiancée Lydia, «la Princesse». Après un long périple, le jeune couple arrive au château de Gripsholm, où ils passent trois semaines enchanteresses. Ils y reçoivent la visite d'un ancien camarade de Kurt, Karlchen, ainsi que d'une amie proche de Lydia, Billie.
Parmi toute une série d'épisodes, une aventure érotique, audacieuse à l'époque de la République de Weimar, relève d'une fraîcheur insouciante le roman.
Par la suite, l'intrigue prend une tonalité plus grave, lorsque les vacanciers tombent sur une petite fille vivant dans une garderie non loin du château, sous le joug d'une directrice sadique. Le couple décide alors de sauver l'enfant meurtrie...
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Présentatrice dans un cabaret berlinois, Barbara annonce chaque soir les numéros qui se succèdent sur la scène. Parmi eux, celui d'un travesti fait salle comble au grand étonnement de Barbara qui n'y voit qu'une mauvaise caricature de femme. C'est alors que lui vient une idée : et si elle se faisait passer pour un homme qui, au cours d'un spectacle, se transforme en femme ? C'est ainsi que Barbara, déguisée en homme et se présentant comme M. Paulus, propose son numéro de music-hall à un cabaret concurrent, qui l'embauche. Et c'est le triomphe. Mais combien de temps Paulus parviendra-t-il à cacher sa véritable identité ?
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Chroniques parisiennes
Kurt Tucholsky
- Rivages
- Rivages Poche ; Petite Bibliotheque
- 17 Février 2010
- 9782743620592
Journaliste, chansonnier, romancier, poète, Kurt Tucholsky (1890-1935) quitta Berlin en avril 1924 et s'installa dans la capitale française où il travailla jusqu'en 1928 en qualité de correspondant pour la Weltbiihne, une des plus importantes revues de la république de Weimar.
De cette collaboration et de cette union avec notre pays vont naître plus d'une centaine de chroniques sur Paris et la France. Pacifiste convaincu, Tucholsky prêche sans relâche le rapprochement franco-allemand et s'efforce de mettre fin aux préjugés de ses compatriotes sur l'" ennemi héréditaire ", la France, et surtout sa capitale, tenue pour l'antre des grisettes et des décadents. tin Allemand qui prend fait et cause pour les Français et par la même occasion critique sa patrie, voilà une perle rare, digne d'un Heine ! L'exercice est délicat, et culmine audacieusement dans " Merci, France ", à la fois cri de grâce et d'adieu.
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"Mingo, tu sais lire, je le sais, simplement tu ne le montres pas.
Ce livre-ci. Il est aussi exempt de mièvrerie, d'enjolivures, aussi peu rassurant - et, dans sa forme, tout aussi noble que toi. Il existe sûrement des hommes-chats et des hommes-chiens. Est-ce que tu aimes les chiens ? Moi non plus. Ils braillent toute la journée, détruisent, par tout ce bruit inutile qu'ils font, les plus beaux silences et, en fait d'indélicatesse, ils ne sont surpassés que par leurs propriétaires (Protestation de la Ligue nationale des amis des chiens - Coucher !).
On ne peut pas t'attraper, je sais. Mais n'es-tu pas tout entier enfermé dans cette phrase ? "Le chat est un aristocrate anarchiste, avec le sain élan vital d'un prolétaire". Cela, c'est toi. Bon, je me relève donc. Et me retrouve tout d'un coup assis dans la grisaille argentée de Paris, et je pense à toi ; aussi à ce matou angora gris-bleu, si petit au début qu'il n'avait même pas encore de nom ; il pouvait juste s'approcher, tout chancelant, quand on entrait dans la pièce ; et puis il n'a plus rien mangé du tout, et il est mort, et maintenant il est enterré dans mon jardin en retraite de Fontainebleau.
Salut, Mingo ! Salut à toi, et à tout ce qui est beau et énigmatique, superflu et gracieusement cambré, insondable et solitaire, et éternellement séparé de nous : aux chats, donc, et au feu, et à l'eau, et aux femmes. Avec une bonne caresse sur ton pelage, Et bien des salutations aux Messieurs et Dames qui habitent chez toi".
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Agréable surprise pour le lecteur moderne de découvrir ou redécouvrir Kurt Tucholsky, cet auteur berlinois des années 1920 tellement lié à son époque, à son pays et à sa langue, mais aussi tellement universel ! De la période d'efferverscence dont il brosse le portrait, il a les contrastes, tiraillé entre la créativité débridée des Années folles et le quotidien de la République de Weimar, fait de tensions tant politiques qu'économiques et sociales. Armé de sa machine à écrire, ce maître de la forme courte met en garde contre tout assoupissement intellectuel et moral ; il veut en même temps rire et faire rire, par une écriture créative, jeu de mots, jeu avec les mots.
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Un jour, un milliardaire américain est victime d'un accident de voiture dans lequel il perd un oeil. Il se fait donc fabriquer un oeil de verre. Le jour où il revient à son bureau, il demande à son secrétaire : « Dites-moi un peu lequel des deux est en verre ! » Le secrétaire l'observe un instant et répond : « Le gauche. » - « Mille tonnerres ! s'exclame le milliardaire, comment avez-vous deviné ? » « Le gauche a une lueur d'humanité », répond le secrétaire.
Une chose est sûre avec Kurt Tucholsky : il n'aime pas l'eau tiède. Son humour est féroce, son ironie piquante et sa lucidité implacable, comme le montrent de manière éclatante ces textes tour à tour drôles, mordants, mélancoliques, et toujours profonds, écrits entre 1913 et 1932. Désespérément engagé, il ne peut que constater, impuissant, que les hommes ne cessent de faire les mauvais choix, ce qui inspira à Erich Kästner cette belle formule pour le décrire : « Un petit Berlinois grassouillet qui, muni d'une machine à écrire, voulait arrêter une catastrophe. »